Arthur Fellig, né Usher Fellig et plus connu sous le pseudonyme de Weegee (12 juin 1899 – 26 décembre 1968), est un photographe américain célèbre pour ses photographies en noir et blanc de la vie nocturne, tout particulièrement celle de sa ville de prédilection, New York.
Usher Fellig est né à Złoczew, près de Lviv, une ville appartenant alors à l’empire austro-hongrois et désormais en Ukraine (Galicie). Fuyant la montée de l’antisémitisme, sa famille fuit l’Europe en 1910 pour rejoindre Bernard Fellig, le père, qui a immigré aux États-Unis peu après la naissance d’Usher. À son arrivée en Amérique, le nom du jeune garçon est changé en Arthur.
Son père, qui est rabbin, s’installe alors à Ellis Island avec sa femme, Arthur et ses trois frères. En 1914, alors qu’il n’est encore qu’en 8e2, Weegee quitte l’école pour subvenir aux besoins financiers de sa famille au moyen de nombreux petits boulots (vendeur de voitures, confiseur, etc.).
Un jour, il se fait prendre en photo dans la rue par un photographe ambulant. Cette rencontre serait le déclic qui le fait choisir la photographie comme métier. Le jeune homme achète un appareil photographique d’occasion et commence à prendre des clichés des enfants en habits du dimanche pour proposer les épreuves aux familles aisées. En 1917, lorsqu’il quitte le foyer familial, Weegee connaît une période de vagabondage, de refuges en gares ferroviaires, en quête d’un endroit chaud où dormir.
En 1918, Weegee obtient, un emploi dans le studio photographique Ducket & Adler. Ce nouvel emploi lui permet de passer son temps dans le laboratoire et d’apprendre les techniques du tirage. En 1923, âgé de 24 ans, il est embauché comme employé de laboratoire par l’agence ACME Newspictures, dont l’activité est de constituer un stock de photographies pour la presse quotidienne de nombreux États américains.
Après quelques années, l’agence lui propose de devenir photographe à temps plein. Weegee accepte, mais n’apprécie guère que ses photographies deviennent la propriété de ACME Newspictures et que son nom ne soit jamais associé aux photos qu’il prend. De cette période de sa vie, il aurait en revanche hérité de son surnom de photographe. Weegee serait en effet une référence au jeu spirituel Ouija, qui consiste à communiquer avec les esprits des défunts, car aux yeux du personnel d’ACME Newspictures, le photographe donnait l’impression de savoir à l’avance où et quand les évènements intéressants vont se dérouler. Il y avait à cela une raison toute simple : Weegee avait dans sa voiture une radio branchée sur les fréquences de la police et était donc prévenu en même temps que les policiers lorsqu’un drame venait de se produire quelque part. En 1935, Weegee devient finalement photographe indépendant.
Le terrain privilégié de Weegee, c’est New York, et tout particulièrement sa vie nocturne, dans ses lieux emblématiques (cabaret, restaurant, refuge de nuit, Metropolitan Opera…), et au fil de ses incidents sordides ou tragiques (crimes, accidents, noyades, incendies…). L’art du photographe consiste, selon sa propre expression, à « montrer combien, dans une ville de dix millions d’habitants, les gens vivent en complète solitude ».
En 1938, Weegee the Famous est le premier et seul photographe à avoir le privilège d’être branché sur la radio de la police. Ce dispositif lui permet d’arriver sur les lieux de crimes, d’accidents, d’incendies, de suicides, en même temps que les policiers, voire avant eux. Ses flashs crépitant rendent compte de ses scènes encore chaudes où les traces laissées ne sont pas nettoyées et rendues à une certaine normalité de la vie quotidienne par le travail des policiers ; le sang s’écoule sur la chaussée, les armes du crime jonchent le sol, la fumée envahit l’atmosphère des rues, les volants sont encore dans les mains des victimes d’accident, les chaussures encore sous les roues, les chocs émotionnels sont imprimés sur les photographies.
Pour 5 dollars l’épreuve, Weegee passe ses nuits dans sa voiture et dort n’importe où pour être réactif aux évènements. L’aménagement de sa voiture est minutieusement étudié. Elle abrite un laboratoire photographique dans le coffre, de nombreux appareils photographiques préchargés en plaques, ainsi qu’un stock d’ampoules de flash et une machine à écrire pour signer ses photos.
Weegee ne croit qu’en l’instantané et à l’enregistrement des scènes dramatiques encore chaudes de la vie quotidienne. Il photographie aussi bien les victimes, les coupables, les policiers, les témoins et passants, recréant ainsi une fresque autour de scènes quotidiennes émaillant le caractère lissé du rêve américain.
Weegee est considèré comme l’un des précurseurs des photographies à sensation des tabloïds, alors qu’il reçoit, en parallèle, la reconnaissance artistique de son travail par des institutions officielles (Museum of Modern Art de New York en 1943).